Roula Safar : « Je suis très honorée d’interpréter pour la première fois des œuvres de compositrices libanaises »

2013-02-26


Roula Safar est une artiste très peu ordinaire qui mélange les genres avec une grâce et un naturel confondants. Invitée par le Centre du patrimoine musical libanais dont le but est de valoriser les compositeurs libanais et de les faire connaître au public libanais, elle offrira le 27 février un florilège d’œuvres de sa composition ainsi que de cinq compositrices libanaises (Violaine Prince, Mona A. Ahdab, Rita Ghosn, Roula Baaklini et Katia Makdissi Warren).


Roula Safar, vous êtes une extraordinaire femme-orchestre : chanteuse lyrique, compositrice, guitariste, percussionniste, harmonisatrice, adaptatrice, chercheuse ! Comment en êtes-vous arrivée là et comment arrivez-vous à concilier toutes ces casquettes ?
C’est un désir d’indépendance qui remonte à mon adolescence qui s’est affirmé avec les années à travers mes études musicales (instrumentales, universitaires et vocales) et la profession de chanteuse lyrique : c’est un désir d’indépendance en m’accompagnant de mes instruments et d’aller à la rencontre des gens. L’interprétation vocale seule ne me suffisant plus, j’ai procédé à des harmonisations et arrangements, ce qui a contribué à élargir le répertoire et à utiliser les instruments qui me semblaient adéquats.
Sensible par ailleurs à la poésie depuis ma tendre jeunesse - à cette époque je créais des chansons poétiques - et avec le métier que j’ai acquis en interprétant un répertoire (rôles d’opéra, oratorios, mélodies et lieder) allant de la musique ancienne à la création contemporaine, en collaborant avec les compositeurs et dans mon parcours, j’ai eu le désir de poursuivre ce chemin inventif avec une exigence qui me mets sur la voie de la composition.

Dans votre récital aux flâneries musicales du CPML, vous allez interpréter pour la première fois des compositrices libanaises. Qu'ont-elles de particulier ?
Ce qui me motive c’est de donner la parole à des femmes dans le milieu de la composition, milieu essentiellement masculin, où il est difficile pour elles de s’affirmer. C’est d’apporter un éclairage sur des pièces que j’ai eu le désir d’interpréter pour témoigner de la richesse musicale du Liban sans avoir l’ambition de tenir un propos exhaustif sur la musique actuelle du Liban et l’œuvre de ces compositrices. Je tiens à préciser que je suis très honorée d’interpréter ces compositrices libanaises et j’espère très fortement pouvoir leur consacrer un cd.

Vous avez fait un travail très pointu et très fouillé sur les langues mortes (gaulois, sumérien, ougaritique...), pouvez-vous nous en dire plus ?
C’est en m’appuyant sur les connaissances des chercheurs en linguistique et civilisations anciennes que j’ai procédé à la recherche des origines des langues liées à mes origines, à celles d’un pays multiculturel et pluri-confessionnel qu’est le Liban.
Témoin de la guerre et de ses ravages, dans ma démarche, j’ai cherché à me placer au-dessus des clivages politiques et religieux. C’est la quête de l’universalité. Les sons que font entendre notamment les langues anciennes sont très inspirants. François-Bernard Mâche, compositeur de musique contemporaine qui a mis en musique des textes en gaulois, hittite, étrusque, égyptien ancien, etc. a été un des révélateurs pour moi. On n’est jamais tout seul sur un chemin. Le sens du texte est intemporel. C’est aussi la fascination pour les vieilles pierres depuis mon enfance : Le Liban, petit pays mais oh combien riche en vestiges de tant de civilisations qui l’ont traversé.
C’est de tenter de créer des passerelles entre les langues anciennes et les langues d’aujourd’hui qui se font écho. C’est d’être à la croisée des chemins à travers les temps dans des espaces différents notamment méditerranéens. Les 2 CDs (‘Racines sacrées’ et ‘Vergers d’exil’) que j’ai enregistrés chez Hortus en 2009 et 2011 en sont les témoins.

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