L’ouverture du Festival international de Byblos, le mardi 5 août 2025, a été marquée par un concert plein d’entrain donné par le compositeur et pianiste Guy Manoukian, qui a enchanté son public par un répertoire multiple et diversifié, entouré de son orchestre et du chœur des voix.
Selon une formule devenue un classique à Byblos, le concert débute par de belles projections sur des écrans géants entourant la scène, représentant la citadelle de Byblos et le port phénicien. Les sites archéologiques et touristiques du Liban défilent, ainsi que la richesse du pays du Cèdre dans tous les domaines, la détermination de ses fils à s’accrocher à leur terre, le tout sur un fond musical qui s’achève par l’hymne national.
« Bonsoir Byblos », lance Manoukian en s’installant au piano, et il entame la soirée par des chansons bien connues du terroir, dont : « Layletna layle min Layali El Omr » (Notre nuit sera une nuit mémorable dans nos vies), pour signifier qu’il en sera ainsi de cette nuit. Il poursuit avec d’autres refrains, dont « Ya Gzayel Yaba » et « Tallo Hbabna » (Nos bien-aimés sont apparus), refrains très populaires au rythme entraînant sur lesquels de multiples troupes de dabké ont dansé.
Une petite ombre à signaler : le retard du début du concert, sans doute dû aux embouteillages monstres sur la route.
L’artiste quitte son piano pour saluer son public de 4 000 personnes, dit-on, de tout âge, venues de toutes les régions du Liban, avec au premier rang des officiels : ministres, députés et personnalités sociales. Il rappelle que c’est la troisième fois qu’il se produit à Byblos et exprime tout son amour pour cette ville six fois millénaire. Mme Rose Choueiri, présidente de la Fondation maronite dans le monde, corrige : « C’est la septième fois. » – « Tiens, ça augmente chaque année ! » rétorque-t-il avec humour.
« Byblos est très chère à mon cœur, et ses fils ont su faire parler d’elle et de son importance », poursuit Manoukian. « Elle incarne l’image du Liban, creuset de culture, d’histoire et de civilisations. Nous devons en être fiers. Tout ce qui est beau a commencé à Jbeil, et cette soirée est le reflet du Liban que nous voulons, auquel nous aspirons. »
Manoukian revient à son piano et annonce une chanson irakienne, affirmant qu’il aime ce genre musical, et évoque l’amitié entre les deux pays. S’élève alors « Zidouni Ochkan » (Donnez-moi encore plus d’amour), et le public vibre au même diapason.
Hommage à Ziad Rahbani
Guy Manoukian déborde d’énergie sur scène, une énergie communicative, et sait créer par son dynamisme une ambiance qui lui est propre. Au bout d’un moment, il enlève sa cravate, retire sa veste et poursuit son riche répertoire de musiques et de chansons des Rahbani et Feyrouz, de Ziad, de Zaki Nassif, de Kazem El Saher, de Sabah, d’Assi El Hallani, et bien d’autres, revisités avec sa propre orchestration, aux rythmes très enlevés.
Il rend un vibrant hommage à Ziad Rahbani : « Ziad est parti, mais il nous a laissé un très grand héritage, non seulement musical. Il existe dans la mémoire, le conscient et le subconscient du peuple libanais. Dans nos comportements, nos attitudes, notre humour, vous verrez que nous avons pris beaucoup de lui. Il était une réalité sociale. » Manoukian présente ses condoléances, et celles de son orchestre, à Feyrouz et à toute la famille Rahbani.
Il invite sur scène « une chanteuse très douée », dit-il, « qui a collaboré avec moi et qui a travaillé pendant neuf ans avec Ziad », invitant Farah Makhoul sur scène, qui interprète une des chansons cultes du grand Ziad : « Kifak Inta Malla Inta », sous de vifs applaudissements.
Un répertoire riche et varié
La soirée se poursuit dans la même ambiance frénétique. Manoukian interprète en solo, au piano, certaines de ses belles compositions, harmonieuses entre Orient et Occident. Les musiciens de l’orchestre se surpassent aussi par d’intéressantes improvisations.
Il se dit particulièrement heureux ce soir, car son épouse et ses trois enfants sont présents à ce concert, et il dédie une belle chanson à sa fille Lara.
Entre un bouquet de chansons et une autre, il évoque son récent périple musical aux États-Unis, en Californie, à Détroit, à New York, puis au Canada, à Toronto et Montréal, et in fine à Paris, à l’Olympia.
« Tous ces expatriés que j’ai rencontrés, dit-il, vivent dans des pays où tout est assuré, mais rien ne remplace la mère patrie et la vie auprès des siens », et ajoute : « Ils sont aussi d’une grande aide aux Libanais de l’intérieur. »
Il signale qu’il y a des chansons inscrites dans la mémoire collective de la nation, qui nous rappellent le passé, nos parents, nos aînés, nos amis, et engage le public à chanter avec lui un refrain léger très populaire : « Tic tic ya Im Sleiman ».
« Nos traditions, poursuit-il, se conservent où que l’on soit dans le monde. Je fais partie d’une génération qui sait ce que signifie le respect du père et de la mère, des proches, et c’est ce qui nous caractérise comme Libanais, partout. »
Musicien, compositeur et pianiste libanais d’origine arménienne, Guy Manoukian a acquis une vaste renommée libanaise, régionale et mondiale, par sa fusion et ses arrangements vivaces de mélodies orientales et contemporaines, et par sa présence scénique. Il se produit à travers le monde et captive toujours son auditoire. Il en fut de même ce mardi soir à Byblos, où, durant deux heures de temps, infatigable, il a créé une ambiance électrisante, faisant revivre de belles chansons, se démenant sur scène, proche de son public.
La soirée s’achève en beauté avec deux chansons cultes : « Bhebak Ya Lebnen » et « Rajeh Rajeh Yetammar ». Debout, l’assistance danse, chante, applaudit, en demande plus, et s’arrache à regret des rivages de la Méditerranée.
PROGRAMME DU FESTIVAL ICI