Carmen à Baalbeck ou la foi qui déplace les montagnes OPERA BAALBECK INTERNATIONAL FESTIVAL, de Zeina Saleh Kayali-Agenda culturel

Carmen à Baalbeck ou la foi qui déplace les montagnes FESTIVAL  OPERABAALBECK INTERNATIONAL FESTIVAL2023MUSIQUE 27/07/2025Zeina Saleh Kayali pour l’Agenda culturel

Un opéra du grand répertoire produit au Liban? De À à Z? Entièrement conçu, pensé et réalisé chez nous? Eh bien oui c’est possible: le festival de Baalbeck l’a rêvé, Jorge Takla l’a fait. Ce sera Carmen de Georges Bizet dont on célèbre les 150 ans.

Il y a quelques mois encore, cela semblait utopique et fou.

 Au fur et à mesure que le temps passait et que les difficultés s’amoncelaient le projet semblait de moins en moins réalisable. Mais c’était sans compter le talent et l’opiniâtreté de Jorge Takla, metteur en scène libano-brésilien de réputation mondiale, pour qui cela représentait un défi à relever, véritable retour aux sources: revenir, cinquante ans plus tard dans l’Acropole mythique où la guerre avait interrompu une collaboration qu’il projetait avec Bob Wilson.

Autour de Jorge Takla, une équipe de choc. Le nec plus ultra de l’art libanais et brésilien: le père Toufic Maatouk à la direction musicale, Rabih Kayrouz pour les costumes, Anselmo Zolla pour la chorégraphie et Nabil Nahas dont les œuvres intemporelles, projetées sur les colonnes millénaires, constituent le décor.

Quant à la distribution, elle incarne à elle seule le dialogue des cultures: les quatre rôles principaux sont français, les danseurs brésiliens, l’orchestre roumain, les chœurs et les autres rôles, libanais.

Il en résulte un spectacle unique, une production d’une originalité absolue, alliant le raffinement et l’élégance à la voluptueuse sensualité orientale.

 

Marie Gautrot (Carmen), mezzo-soprano au timbre chaleureux, hiératique et fragile sous ses airs bravaches, Julien Behr (Don José) ténor lumineux, incarnation de la fureur et de la douleur, Vannina Santoni (Micaela) soprano, aux aigus si doux, bouleversante en femme trahie et Escamillo (Jérôme Boutillier) baryton, aux graves si beaux et à la diction parfaite, forment un quatuor de tête d’une grande homogénéité.

Grace Medawar, Myra Akiki, Fady Jeanbart, Jason Choueifaty, César Naassy et Philippe-Nicolas Martin sont très convaincants dans leurs interventions respectives, alors que pour certains c’est une toute première expérience scénique de cette envergure.

 La chorale de l’Université Antonine, plutôt habituée au format de l’Oratorio, se révèle un formidable chœur d’opéra.

Les chorégraphies qui ponctuent le propos, tantôt lascives ou plus impétueuses, dans de somptueuses tenues aux couleurs chatoyantes, complètent un spectacle aussi séduisant pour les yeux que pour les oreilles.

À la tête de l’excellent Orchestre de chambre de la Radio roumaine, le père Toufic Maatouk offre une lecture dynamique de la partition. Cordes soyeuses, bois précis et aériens, cuivres percutants répondent sans faillir aux sollicitations d’une baguette qui détaille avec passion les subtilités de l’œuvre. Un chef et un orchestre en osmose parfaite avec le plateau.

Le public sort d’une représentation d’un tel niveau la joie au cœur. L’espoir est permis. Tout n’est pas perdu, le Liban culturel et artistique est dans une forme éblouissante et le festival de Baalbeck, revenu à son plus haut sommet, en est la preuve éclatante.

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