Éblouissant concert avec le Requiem de Mozart pour signifier le retour en force du Conservatoire national de musique 24/02/2025 de Gisèle Kayata Eid pour l’Agenda Culturel MUSIQUECONSERVATOIRECHORALES
Il y avait de l’allégresse dans l’air. Les murs de l’église St Joseph de la rue Monot, pourtant habitués aux rendez-vous musicaux, semblaient eux-mêmes être les premiers invités, ce 22 février. Le public qui s’était déplacé malgré le froid mordant se saluait chaleureusement comme après une très longue absence. Les musiciens accordaient leurs violons, les choristes révisaient leurs partitions, les solistes se réchauffaient la gorge, les gardes de sécurité notamment de l’Ambassadeur de France, M. Hervé Magro, se positionnaient dans la foule, les photographes ajustaient leurs objectifs, M. Tarek Mitri, vice-président du Conseil s’installait et les six caméramans de Télé Liban qui retransmettait en direct le spectacle, consolidaient leur place pour ne rien rater de l’événement qui rassemblait tout ce monde joyeux et enthousiaste. Le Conservatoire national de musique était de retour et tenait à saluer l’ouverture de la saison mais surtout la renaissance du pays et notamment de sa culture.
Prenant la parole pour lancer la soirée, Mme Hiba el Kawass a signifié avec bonheur et fierté ces retrouvailles sous le signe de la résurrection. La directrice du Conservatoire a salué la résilience des Libanais qui ne baissent pas les bras et a reconfirmé que la musique demeure un pont unificateur. « Avec ce concert, c’est la voix du Liban qui joue ce soir la symphonie de l’espoir. Le monde nous observe et nous guette. Mais nous y arriverons ». À ce propos elle souligne l’étroite collaboration avec le Ministre de la Culture, M. Ghassan Salamé avec qui elle partage la même vision, celle de développer dans l’urgence des projets artistiques qui engrangeraient de nombreuses opportunités et autant d’investissements. Et Mme Kawass d’ajouter : « Nous œuvrons pour la diplomatie musicale, celle qui inspire l’unité et la création. C’est notre force à l’international. » Elle a enfin et surtout profité de son allocution pour lancer la création de la première chorale philarmonique au Liban : « Les inscriptions sont en cours pour un début de voyage dans la musique symphonique » avant de céder la tribune aux dizaines d’artistes prêts à lancer le Requiem de Mozart qui sera divinement chanté et interprété.
Après une mise en bouche de cinq petites pièces pour cordes, et la poignée de main avec le Premier violon Mario Rahi, le jeune chef d’orchestre Lubnan Baalbaki accapare le regard des dizaines de chanteurs et de musiciens suspendus au mouvement de sa baguette fougueuse et autoritaire, avant de prendre son envol avec quelques notes plutôt douces.
Très vite, la musique s’amplifie, les voix rentrent. Un frisson traverse l’audience. Le charme opère. L’œuvre de Mozart écrite la dernière année de sa vie se déploie alors dans toute sa majesté. Les caméras se figent, les centaines de personnes tassées sur les bancs frémissent aux vibrations, alors que le Père Rahmé, dans un coin, respire au rythme de ses choristes. Les volutes de la soprano Marie-Josée Matar s’élèvent, bientôt suivis par les talents conjugués de la mezzo française Axelle Saint-Cirel, le ténor Béchara Moufarrej et le baryton Shadi Torbey.
Il en sera ainsi toute la soirée, rythmée par la Chorale de l’Université Notre Dame fondée en 1993, la quarantaine de musiciens libanais et internationaux de l’Orchestre symphonique national, le tout dans une orchestration magistrale du dernier chef-d’œuvre de Mozart qui explose au deuxième mouvement, tonne au Sanctus, supplie à l’agnus Dei…
Une performance enlevée, sous les voûtes éclairées tantôt en mauve, rose ou bleu, qui a invité à une prière de reconnaissance dans cet enclos qui transcende les discordes, déceptions et inquiétudes. L’apothéose de ce beau concert se fera dans une lumière blanche réjouissante. Une finale magnifique avec l’heureuse promesse d’un retour en force d’un organisme étatique qui entend bien raviver son empreinte dans le paysage artistique et culturel libanais.