Zeina Saleh Kayali
Portrait d'un jeune musicien franco-libanais qui vit à Paris et dont l'actualité commence à se faire foisonnante.
Comment êtes-vous "tombé" dans la musique ?
Mon père était pianiste et guitariste amateur. Enfant, je l’ai toujours vu heureux de faire de la musique et de nous jouer ses morceaux préférés. En mélomane averti, il avait l’habitude de piocher dans sa collection de vinyle pour me faire « écouter quelque chose que je ne connaissais pas encore » : c’est ainsi que j’ai vécu mes premiers chocs artistiques, en quelque sorte. Le monde des sons me procurait les plus grandes émotions et rendait la réalité plus belle, plus profonde. Encore aujourd’hui, vivre dans la musique est comme un coup de foudre toujours recommencé.
Quel a été votre cursus musical ?
J’ai appris mes premiers morceaux de piano avec mon père, avant de me former auprès de professeurs de l’école française avec Prisca Benoit et Mladen Tcholitch, mais aussi de l’école russe aux côtés de Branka Balevic. J’ai passé mon Certificat d’Etudes Musicales au CRR (Conservatoire à Rayonnement Régional) de Paris, mon Diplôme d’Etudes Musicales au Conservatoire de Gennevilliers, et enfin mon prix d’Excellence au CRR de Rueil-Malmaison.
En composition, j’ai étudié l’écriture et l’orchestration au CRR de Paris avec et Jean-Michel Bardez, ainsi que la composition contemporaine au Conservatoire de Gennevilliers avec José-Manuel Lopez-Lopez.
Comment vous est venu le déclic de la composition ?
J’ai toujours eu envie de m’exprimer avec des sons, pour partager un message, une vision, une histoire. La composition est à la fois un espace de liberté totale où l’on s’affranchit des règles (parfois pour s’en créer d’autres), et d’aventure car on avance souvent vers l’inconnu. La création et la quête, sont deux états qui me fascinent.
Comment définiriez-vous votre langage musical ?
Un langage plutôt « contemporain » fait couleurs et d’évènements abstraits, qui représentent la contemplation et des questionnements profonds (proches par exemples des questions philosophiques que pose Albert Camus dans ses oeuvres de jeunesses.) J’utilise pour cela les modes de jeu des instruments classiques agrémentés d’effets électroniques pour les propulser dans un « ailleurs ».
Mon langage connait aussi des mutations lorsque je compose pour un film, un court-métrage ou une marque. Je dois alors me fondre dans le genre musical qui conviendra le mieux au projet, travailler toujours en équipe et à l’écoute. C’est alors le moment d’investiguer la tonalité, les modes, l’électronique.
Le Liban a-t-il une place dans votre vie musicale en général ou votre processus de création ?
Bien sûr. Pour prendre quelques exemples, j’ai été très marqué par la voix de Fayrouz : son timbre à la fois chaleureux et dramatique me rappelle toujours de produire le plus beau son qui soit lorsque j’interprète des œuvres lyriques au piano.
Quant aux compositions des frères Rahbani, elles déploient tour à tour, le mystère, le drame, la sensualité, la nostalgie. C’est une musique très poétique, et qui pourtant contient des mots de tous les jours, comme si c’était l’histoire de chacun. Ces thèmes sont devenus incontournables dans mes compositions et j’essaye de me les approprier, avec nouveau regard je l’espère.
J’ai d’ailleurs joué une réduction pour piano de la chanson « Addaych Kan Fi Nass », publiée en vidéo sur mon compte Instagram et FaceBook.
Quels sont vos projets en cours ?
Je viens de finir l’enregistrement d’une nouvelle composition qui sera diffusée au Musée Yves Brayer de Mars à Novembre 2022. Il s’agit d’une commande du musée lui-même et de l’agence East European Arts, sous le mécénat de Victoria Lacoste (actrice, productrice et dirigeante de Edelweiss Film Production).
En outre, j’ai composé la musique d’un film qui sera diffusé prochainement mais je ne peux en dévoiler plus pour le moment.
Pour ce qui est des récitals de piano, je serai en concert au mois de Juin à Paris à l’église Saint-Julien-Le-Pauvre dans un programme Chopin. Puis en Juillet, aux Baux-de-Provence autour d’une exposition consacrée à la sculptrice Camille Claudel, dans un programme d’œuvres de Debussy, Satie et Poulenc.
Un autre concert privé se tiendra en octobre prochain au Musée Rodin, à Paris : un récital piano solo et chant avec la soprano lyrique Lili Aymonino.
Que faut-il vous souhaiter ?
De toujours pouvoir partager la musique avec les autres.