Dans l'agenda culturel l'interview de Violaine Prince à la veille de la création mondiale de son Adagio pour cordes

2016-03-09

L’Orchestre philarmonique du Liban continue à mettre en lumière la musique savante libanaise, et notamment les compositrices libanaises. Après Bushra el-Turk, en février, voici que c’est Violaine Prince qui est programmée le vendredi 11 mars. En effet son Adagio pour cordes y sera interprété sous la baguette de Walid Moussallem. A quelques jours de cette création mondiale, Violaine Prince répond aux questions de l’Agenda Culturel.


En 2009, vous disiez que votre rêve était d'être jouée au Liban. Dans quelques jours, votre adagio sera joué par l'Orchestre philarmonique du Liban. Est-ce l'aboutissement d'un rêve ?
Un aboutissement a un air de “point final”, j’espère que cela n’en sera pas un. Et puis, ce n’est pas vraiment la première fois. Grâce à Paul Safa et sa chorale, grâce à Roula Safar, à Christine Marchais et Marc Sieffert, certaines de mes pièces ont été jouées au Liban et ont reçu un très bon accueil de la part du public présent.
Disons que l’Orchestre philharmonique est un grand pas en avant. J’ai un respect immense pour cet orchestre : je me réjouis absolument de rencontrer les musiciens, et je tiens à remercier Walid Moussallem, qui dirigera cet orchestre, de m’avoir fait confiance. Ce que je sais de lui me permet de penser qu’il va briller dans la création mondiale de cet Adagio, puisque cela sera ainsi (cette œuvre existe déjà sous forme de simulation sur YouTube). Walid Moussallem est une personnalité accomplie : il a de nombreuses cordes à son arc, et j’adore sa rigueur tranquille.
Et mention spéciale pour mon ami Jamal Aboul Hosn, qui a proposé mes œuvres. C’est un compositeur de talent et un musicien de grande qualité (je fais partie de son fan club…).
J’espère vraiment que c’est le début d’une belle histoire…

Pensez-vous qu'il y ait un véritable courant de musique savante libanaise ?
C’est absolument certain. Vous avez vous-même mis le doigt dessus, il y a quelques années maintenant, et je pense que vous avez fait preuve d’un très grand flair. A titre personnel, je ne connaissais que très peu de compositeurs libanais avant votre premier ouvrage. Depuis quelques années, j’en découvre beaucoup car vous m’avez incitée à cela. Je ne peux que vous en remercier de tout mon cœur. Ils ont chacun sa particularité, sa sensibilité, sa finesse. Tous ont quelque chose à dire qui sort de l’ordinaire. Dans la musique savante libanaise, j’ai trouvé des œuvres qui me font pleurer, d’autres sourire, d’autres rêver, et d’autres penser… Je suis aussi très heureuse de voir qu’il y a pas mal de femmes compositeurs. J’ai rencontré Rita Ghosn, Buchra el-Turk. Ce sont des personnes charmantes et très intéressantes. J’espère en connaître d’autres aussi. Mon rêve serait que les compositeurs puissent se rencontrer entre eux dans un esprit de fraternité et de coopération. Nous avons tous en nous le désir de créer du beau. Et toutes les beautés sont importantes. Une voix unique serait pauvre. Les solos sont bien, mais j’aime aussi la complétude des symphonies.

Qu'aimeriez-vous pouvoir faire entendre encore au public libanais de votre catalogue ?
Ah, pas mal de choses. Déjà, si l’Orchestre est content de moi, j’aimerais bien qu’il joue une de mes symphonies, ou, en plus petite formation, mes quatuors à cordes, mes trios, etc. Ça c’est pour la musique instrumentale. Mais un autre grand désir serait que ma musique sacrée soit jouée dans le pays qui lui a servi de source. Le Requiem, dont certains connaissent des extraits et qui est joué en France, mais aussi d’autres œuvres comme un Stabat Mater pour deux voix de femme et un quatuor à cordes, ou une Missa Brevis, ou a encore un Alleluia.… J’ai également mes œuvres en langue syriaque (l’Ave Maria et le Pater) pour soliste et clavier, ou les psaumes chantés qui ont été créés en France (De Profundis, Dieu est ma forteresse, Le Juste est comme le Palmier). J’ai beaucoup d’œuvres qui attendent dans les limbes des ordinateurs et des instruments simulés. Le Liban leur donnera-t-il vie ? En tous cas, certains musiciens libanais le souhaitent, et mes œuvres, ces petites âmes musicales, et moi leur en sont très reconnaissantes.

Quels sont vos projets ?
Un très beau projet est en train de prendre corps actuellement avec la cantatrice Fadia Tomb (ah cette voix de contralto… quelle extraordinaire beauté !), qui souhaite créer un enregistrement dédié aux compositeurs libanais mettant en musique des poètes libanais. J’ai écrit pour Fadia une pièce sur le très beau poème de Jad Hatem intitulé ‘Pater’ (extrait de son recueil ‘L’audace pascale’). J’espère que son projet se concrétisera très vite et que le public pourra acquérir ce CD absolument unique. J’ai également quelques concerts prévus, dont celui donné par le Chœur Jubilate le 10 mai prochain à Neuilly-sur-Seine et qui chantera l’Introït du Requiem avec une version orchestrale, sous la direction d’Eric Darrigrand.
Aussi, des pourparlers pour l’enregistrement d’œuvres chorales aux Etats-Unis (j’ai été contactée par un groupe à Boston)… Sinon, je suis à la recherche d’un agent de compositeur, oiseau rare entre tous. Si vous en entendez parler, surtout, soutenez ma candidature !!

Propos recueillis par Zeina Saleh Kayali


> Concert le 11 mars 2016 à 20h30, Eglise St Joseph des Pères jésuites. Entrée libre.

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