Alain Pâris : ’’La force des Libanais est de faire des projets
envers et contre tout’’
Le 09/10/13
Chef d’orchestre invité à diriger les plus
grandes formations orchestrales à travers le
monde, pianiste, professeur de direction
d’orchestre, membre des jurys de concours
internationaux, producteur d'émissions
musicales sur France Musique et France
Culture, Alain Pâris dirigera le vendredi 11
octobre l’Orchestre philarmonique du Liban
en l’église Saint Joseph des Pères jésuites
de Beyrouth. Au programme de ce concert
exceptionnel, une pièce du grand
compositeur libanais Bechara El-Khoury.
Vous vous définissez comme un 'musicographe’. Que cela signifie-t-il
exactement ?
Contrairement au musicologue qui est un chercheur, le musicographe, par ses
écrits ou ses émissions à la radio, cherche à faire connaître la musique, à la
diffuser, à la partager. J’aime cette notion du partage qui rassemble autour d’une
oeuvre musicale.
Vous êtes un grand ami du Liban, vous y avez fait plusieurs séjours et y
avez souvent dirigé l’Orchestre philarmonique. Comment a commencé
cette histoire entre notre pays et vous ?
En 1974, à Bagdad, j’ai été invité à diriger le National Iraqi Orchestra, formation
proche de la mouvance des orchestres des pays communistes de l’époque. C’est
là que j’ai rencontré Walid Gholmieh qui était en mission pour aider à structurer
la musique en Irak. En me voyant diriger, il a eu cette réflexion : ’’S’il y avait un
orchestre au Liban, j’inviterais ce chef !’’.
Par ailleurs, ma belle-soeur a épousé un Libanais, donc j’y ai aussi des attaches
familiales. Depuis la fondation de l’Orchestre philarmonique du Liban, je suis
invité tous les ans à venir le diriger. L’ambassade de France a beaucoup aidé à la
mise en place de ce partenariat, et au début nous programmions beaucoup de
compositeurs français. Ce concert du 11 octobre avait été initialement
programmé pour octobre 2012, mais il a dû être annulé au dernier moment à
cause de l’attentat qui a coûté la vie au chef des renseignements de la police
libanaise. Je reste toujours impressionné par la vitalité des Libanais et leur
capacité à rebondir et à faire de projets malgré l’adversité qui est leur lot
quotidien.
Vous avez donc suivi l’évolution de l’Orchestre philarmonique libanais
depuis sa création. Quel est votre regard sur cette formation aujourd’hui ?
Au tout début, les musiciens étaient de niveaux très disparates. Ce n’est plus le
cas aujourd’hui où le niveau des instrumentistes est beaucoup plus homogène.
C’est un orchestre qui peut faire beaucoup. Certains musiciens occidentaux à qui
je l’ai fait écouter dans le cadre de mes émissions, étaient stupéfaits d’entendre
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Alain Pâris : ’’La force des Libanais est de faire des projets envers et contre tout’’, Agenda Culturel
http://www.agendaculturel.com/Musique_Alain+Paris_La_force_des_Libanais_est_de_faire_des_projets_envers_et_contre_tout[09/10/2013 08:19:29]
une telle sonorité. Mais je pense que l’Orchestre philarmonique libanais peut
encore progresser, notamment en invitant régulièrement des grands chefs
internationaux à venir le diriger et en ouvrant son répertoire. J’ai d’ailleurs été
très heureux d’apprendre que récemment, l’orchestre a mis à son répertoire des
oeuvres de compositeurs libanais.
Et justement vous allez diriger l’oeuvre de l’un des plus grands d’entre
eux, Bechara El-Khoury. Parlez-nous de cette rencontre.
J’ai rencontré Bechara El-Khoury chez le violoniste Gérard Poulet et nous avons
tout de suite sympathisé ! J’ai dirigé l’une de ses oeuvres, ‘Fleuves engloutis’, lors
d’un concert au Caire et depuis je n’ai plus eu l’occasion de l’interpréter.
Récemment, j’ai reçu un choc en écoutant ‘Orages’, la pièce qu’il a composée
pour l’Orchestre de Paris et qui a été créée Salle Pleyel en septembre dernier.
Quelle beauté ! Comme il sait faire sonner un orchestre ! Avec l’Orchestre
philarmonique libanais, nous allons jouer le 4e poème symphonique ‘Le vin des
nuages’, composé en 1997. Le début de l’oeuvre est minimaliste, puis cela se
déchaine, avec une orgie de sons et de couleurs. Je pense qu’entre le début et la
fin de la pièce, Bechara a dû manger trois boîtes de chocolat !!!
Cela vous a-t-il donné l’envie de découvrir d’autres compositeurs libanais
?
Absolument. Je sais qu’il en existe d’excellents dont certains vivent en France
comme Gabriel Yared, Zad Moultaka ou Naji Hakim.
Propos recueillis par Zeina Kayali, Paris